A la veille de la trêve hivernale, l’Olympique de Marseille nous a ouvert ses portes afin de s’entretenir avec les joueurs qui disputeront la Coupe d’Afrique des Nations en Côte d’Ivoire. L’occasion pour lionsdelatlas.ma d’inviter Amine Harit à se livrer au jeu des questions-réponses, mais aussi Azzedine Ounahi (cf: Azzedine Ounahi: « Ramener la Coupe à la maison ! »)

                                                               AMINE HARIT :

LDA :  Etant donné que tu n’as pas pu disputer la dernière coupe du monde avec le Maroc pour cause de blessure, est-ce que tu aborde cette compétition avec un esprit de revanche?

A.H : De revanche non, parce que je ne sais pas sur quoi je prendrai une revanche, mais avec beaucoup de motivation, encore plus vu que j’ai raté quelque chose de grand, beaucoup d’envie de revivre les mêmes émotions.

LDA : Tu n’as pas complètement raté la coupe du monde… tu as quand même pu rejoindre tes coéquipiers en sélection au Qatar, même si c’est différent, est ce que ça t’a permis de participer à l’aventure et d’atténuer un peu la frustration ?

A.H : C’est clair que ça a… (il hésite…) ouais ça a recouvert quelques plaies mais ça n’a pas enlevé l’appétit que j’avais en regardant les matchs, mais comme je l’ai dis à l’époque c’est le destin, ça ne m’était pas destiné mais là y a une CAN qui arrive et j’espère qu’il n’y aura pas de problème cette fois ci, mais en tout cas je suis très très content de pouvoir jouer une compétition aussi importante avec le Maroc si peu de temps après la coupe du monde, ça me permet d’oublier un peu cette coupe du monde et le fait de l’avoir raté et de me concentrer sur cette nouvelle compétition avec le Maroc.

LDA : La CAN c’est quelque chose qui a une valeur particulière pour toi, quelque chose dont tu rêvais quand tu étais petit ?

A.H : Bien sûr pour moi c’est quelque chose d’important il n’y a pas de différence entre une CAN et une coupe du monde, c’est quelque chose qui quand ca touche au pays ça revêt un caractère particulier, gagner une CAN ou Coupe du Monde avec son pays c’est quelque chose d’importantissime d’autant plus que le Maroc n’a pas fait une très grande CAN depuis un moment, donc on a cette pression positive de devoir ramener de la joie et du bonheur encore au peuple marocain.

LDA : Tu es bi-national tu a grandi en France mais quel lien tu a gardé avec le Maroc durant ton enfance ?

A.H : J’ai des parents 100% Marocains, même si je suis né en France, à la maison on parlais beaucoup l’arabe, voir que l’arabe… et j’ai toute ma famille qui est au Maroc, j’y allais tout les ans pour y passer mes vacances en famille notamment mes grands-parents que j’allais voir, mes oncles, enfin j’avais beaucoup d’attache avec le Maroc.

LDA : Mais tu a joué pour la France en sélection de jeunes, et à un moment ça à été clair pour toi qu’il fallait changer de sélection ?

A.H : A un moment donné ce sont des choix de famille, de ses racines, des envies personnelles, je ne posais pas vraiment la question durant mes années en sélection jeune mais c’était évident pour moi qu’en senior professionnel mon choix allait se porter sur Maroc, mais en aucun cas je regrette d’avoir joué pour la France, j’en suis même très fièer et ça m’a énormément apporté et je suis reconnaissant envers les équipes de France jeunes, ce n’est pas parce que j’ai choisi de jouer pour le Maroc que j’oublie ce que j’ai vécu avec eux.

LDA : Comment tu te sens avant cette CAN ? Comment tu abordes la compétition ?

A.H : Honnêtement je me sens très très bien, je pense que ça se vois un peu sur le terrain et je l’aborde avec beaucoup de sérénité, je pense que j’ai beaucoup changé dans ma vie de tous les jours, dans ma manière d’être, dans mon style de jeu, là où j’avais énormément d’excitation avant une grande compétition, je me sens beaucoup plus calme et je me suis canalisé, j’aborde les compétitions et les matchs de manière différentes, je pense que ça va beaucoup m’aider durant cette compétition.

LDA : Tu dis que tu es plus calme, mais il y a toujours de l’excitation quand même avant la compétition ?

A.H : bien sur qu’il y en a quand même, c’est une grande compétition internationale, surement l’une des plus belles CAN de l’histoire, il y a beaucoup d’attente avec de très très grosses équipes, avec beaucoup de top joueurs jouant dans des top clubs Européens, donc vous dire que je ne suis pas excité du tout et que j’y vais en mode tranquille, c’est faux ! mais c’est une excitation avec une approche différente.

LDA : Tu nous disais tout à l’heure qu’il y avait une histoire un peu difficile entre le Maroc et la CAN… comment tu l’expliques et est-ce qu’en interne vous vous dites qu’avec les atouts du Maroc et après la belle coupe du monde ce ne serait pas le moment de gommer ces années difficiles ?

A.H : L’expliquer je ne saurais pas, c’est vraiment une période assez lointaine la dernière fois que le Maroc a remporté la CAN, les mentalités ont changées, tout comme le football Africain qui a énormément changé, on remarque que beaucoup plus de joueurs choisissent de représenter les pays africains et donc il y a plus de qualités et aujourd’hui après avoir fait une coupe du monde comme celle-là je pense que le Maroc se doit de montrer un très beau visage en coupe d’Afrique mais surtout pas y aller en se disant qu’on est le premier pays Africains à avoir atteint les demi-finale d’une coupe du monde, c’est pas pour autant que les autres équipes vont nous respecter ou qu’on se vois un peu trop beau parce que je pense que notre parcours en coupe du monde c’est une source de motivation pour toutes les sélections qui vont nous affronter, à nous d’être respectueux et d’aborder les matchs comme on a pu le faire durant la coupe du monde.

LDA : Sans arriver comme un demi-finaliste, le Maroc à un effectif plutôt solide et relativement complet avec des joueurs de haut niveau à chaque ligne ?

A.H : Etre demi-finaliste en coupe du monde c’est bien durant la coupe du monde, arrivé en coupe d’Afrique ça ne nous fera pas passer les poules d’être demi-finaliste de coupe du monde, ça reste une fierté bien sûr mais comme je l’ai dit ça va être une surmotivation pour les équipes qui vont nous affronter. Avec le groupe qu’on a et la qualité qu’on a, ce serait dommage de pas montrer un beau visage…Je ne dis pas la gagner parce qu’il y a toujours des faits de jeux ou des choses qui peuvent influer le résultat, mais au moins donner le maximum et si on a cet état d’esprit de se donner à 100%, ça se passera bien.

LDA : quel est ton objectif personnel pour cette CAN ?

A.H : C’est de la gagner ! Si on commence une compétition comme ça avec l’équipe qu’on avec les joueurs qu’on à et après avoir fait ce qu’on a fait à la coupe du monde, si on arrive à la CAN juste pour figurer, ça ne sert à rien d’y aller. Comme je l’ai dit on à une équipe qui dispose d’énorme qualités et on doit tous y aller pour la gagner, et je pense que n’importe quelle sélection, même celles que personne n’attend y vont avec l’objectif de la gagner, sinon ca sert à rien de participer à ce genre de compétition.

LDA : Avec la sélection tu as déjà participé à une Coupe du Monde mais, bizarrement, jamais à une Coupe d’Afrique, comment tu imagines une CAN ?

A.H : Des équipes très physiques, un climat différent de ce qu’on peut rencontrer au quotidien en club, beaucoup d’humidité, des terrains pas toujours très faciles à jouer, une ambiance particulière avec beaucoup de chant, enfin une ambiance Africaine très spéciale et toutes ces choses font qu’une Coupe d’Afrique n’a rien à voir avec une Coupe d’Europe ou avec un  match de ligue des champions, même si ca peut être tout autant important, c’est toutes ces petites choses qui font qu’une CAN, même si je ne l’est jamais vécu, mais pour avoir joué beaucoup de matchs dans des pays Africains, je sais que ça va être très compliqué et c’est plus un travail mental que sur le terrain.

LDA : Pour revenir à ton cas personnel qu’est-ce que ça t’a fais de revêtir ce maillot pout la première fois et qu’est ce que ça te fait à chaque fois que tu le porte avec les Lions de l’Atlas ?

A.H : Toujours la même fierté au moment de revêtir le maillot, de chanter l’hymne national, ça procure des frissons et des émotions, surtout après la coupe du monde que j’ai raté, c’est double-dose d’émotion et de plaisir, c’est quand on rate quelques choses même si c’est temporaire qu’on se rend compte de son importance et j’en ai fait les frais, donc aujourd’hui à chaque fois que je met se maillot et que je joue pour le Maroc je fait en sorte de tout donner pour ne pas regretter. Je ne dis pas que je serais tout le temps bon ou que je ferais des super matchs mais au moins je serais tranquille dans mon esprit et avec moi-même, je sais que j’aurais tout donné.

LDA : Depuis ton retour à la compétition tu a été rappelé à chaque fois par Walid Regragui, quel est ton rôle avec la sélection sur et en dehors du terrain ?

A.H : Aujourd’hui, je suis l’un des plus ancien dans le groupe, même si je suis encore jeune (rire !!!) il y a beaucoup de jeunes joueurs qui viennent d’arriver, j’essaye donc de redonner ce que les anciens ont pu me donner à mon arrivé et leur donner de la confiance, je vais pas leur apprendre à jouer au foot… si ils sont là c’est qu’ils le méritent, mais vraiment de créer cet esprit de famille qu’on a réussis à créer depuis maintenant 1 an et demi et qui a porté ses fruits, et toujours garder ce plaisir d’être ensemble, malgré les choix du coach, être sur le banc ou sur le terrain. Je suis arrivé à un âge de maturité footballistique et personnel qu’il faut que ca se ressente sur le terrain, que je sois le premier à donner l’exemple parce qu’on sait tous très bien que les plus sont les premiers a mettre le bleu de chauffe et à se battre comme des chiens, un jeune doit pas se permettre de rentrer ou te remplacer sans en faire autant donc c’est cette identité et ce caractère que j’essaye de transmettre aux plus jeunes.

LDA : Avec tous ces jeunes qui arrivent justement de qui te sent tu le plus proche naturellement ?

A.H : Bilel ou encore Saibari qui sont très jeunes, ou encore Bouchouari, tous ces jeunes qui arrivent, même si Bilel il a déjà fait la coupe du monde et a commencé sa carrière il y 2 ans. Tous ces jeunes qui arrivent sont de supers joueurs et je ne vais pas leur apprendre à jouer au football, mais juste leur parler parce que moi quand je suis arrivé j’ai été mis à l’aise par des plus ancien je pense par exemple à Medhi Benatia quand il était encore en sélection ou à Romain Saiss, donc ca m’a fait du bien notamment dans des période de doute de parler avec ces gens-là, comme par exemple dans des moments ou j’estimais devoir jouer et où je jouais pas ils m’ont fait comprendre que la sélection c’est particulier qu’on y est pas pour son plaisir personnel, sa petite personne, qu’on est là pour travailler pour toute une nation pour rendre fière tout un pays, en club les choses sont différentes et aujourd’hui c’est moi qui essaye de leur expliquer tout ça, quand un sélectionneur vous appel même si vous êtes amené à ne pas jouer même une minute, il faut faire en sorte que celui qui joue soit dans les meilleurs dispositions et ne pas montrer sa frustration, donc vraiment créer cet esprit de famille qui nous fera avancer pendant cette coupe d’Afrique.

LDA : Après toutes ces années à suivre et couvrir le Maroc en compétition officielle, on a tous en tête les dissensions qu’il y avais entre les joueurs dit « locaux » de la Botola et les joueurs dit « MRE » évoluant notamment en Europe, on sent aujourd’hui que les choses ont beaucoup évolué, comment tu le vis de l’intérieure ?

A.H : Ben c’est exactement ce que tu dis, je ne dirais pas qu’il y avait des clans mais la barrière de la langue, les joueurs allaient naturellement avec les joueurs qui parlaient la même langue. Aujourd’hui il y a plus ça, tout le monde discute avec tout le monde, rigole avec tout le monde, avec beaucoup d’affinité entre nous. C’est possible que ce soit une histoire de changement de générations, les jeunes joueurs s’intègrent plus facilement que ce soit ceux de la Botola ou ceux jouant en Europe.

LDA : Ne serait-ce pas aussi le travail de fond depuis l’arrivée de Fouzi Lekjaa à la tête de la FRMF ?

A.H : C’est vrai que le président a vraiment fait un travail monstre tout comme le coach qui a une grosse part de responsabilité, parce qu’avant d’être notre coach on le considère vraiment comme un grand frère, à partir du moment où on a ce genre de rapport ça aide vraiment et ça nous donne vraiment la sensation qu’avant même de venir pour une rencontre ou une compétition on vient retrouver sa famille. Avant même de penser à ce qui va se passer sur le terrain on est content de se retrouver, ce n’est pas toujours le cas mais chez nous vraiment on sent vraiment qu’on est tous heureux de se retrouver tous ensemble.

LDA : Que peut-on te souhaiter et souhaiter au Maroc pour la CAN ?

A.H : (les mains levées au ciel…) Déjà que tout le monde soit en bonne santé pour cette CAN, pour moi comme pour les autres, qu’on puisse avoir tout le monde à disposition et de gagner la Coupe d’Afrique inchallah !

LDA : Pour en revenir aux conditions climatiques, tu es un joueur qui court beaucoup et qui laisse beaucoup d’énergie, comment tu vas gérer de jouer dans ces conditions particulières?

A.H : Pour avoir joué en Côte-d’Ivoire c’est très dur, on a vraiment l’impression qu’on peut pas aller chercher son souffle, les crampes arrivent beaucoup plus vite, les muscles s’atrophie, le jeu en Afrique pour quelqu’un qui n’a pas l’habitude c’est assez compliqué et de devoir enchainer, mais le coach à suffisamment d’expérience notamment avec cette coupe du monde ou on a fini vraiment a sec et sur les rotules, ça a été une bonne expériences pour gérer son groupe et en tirer le maximum et arriver le plus loin possible avec un maximum de joueurs « frais » donc je pense qu’à ce niveau on est armé pour tenir 90 minutes sur tout les matchs…. Voir plus mais je n’espère pas !